Journée internationale de la langue maternelle
Tempo traduction
Langues en dialogue
Trois Espaces Linguistiques (TEL)
Prix Ibn Khaldoun-Sengor
Diversité et découvrabilité linguistique
Par-delà le constat que chacun partage de la diversité linguistique du monde, la prise en compte des dynamiques s’instaurant entre les langues, de leur coexistence au sein d’un même territoire, voire des interactions qui s’opèrent entre elles, est très variable selon les pays. Seules les menaces de disparition qui pèsent sur un grand nombre de langues sont réellement considérées, mais plutôt d’un point de vue patrimonial, ce dont témoignent par exemple l’adoption de la Convention pour la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel par l’UNESCO (2003) ou les programmes de préservation mis en œuvre par différents acteurs, comme la constitution d’un Atlas des langues en danger ou l’enregistrement des supposés derniers locuteurs d’une langue par l’UNESCO ou l’inventaire et la collecte réalisés par le programme Sorosoro.
L’espace dit « francophone » est en réalité marqué par la présence d’un très grand nombre de langues et le français se trouve pratiquement toujours en situation de coexistence avec d’autres idiomes nationaux et même, très souvent, en position minoritaire, soit par le nombre de ses locuteurs, soit par l’usage qui en est fait quotidiennement. À cet égard, les dynamiques démo-linguistiques propres aux pays d’Afrique subsaharienne sont particulièrement intéressantes à étudier (voir « Cohabitation des langues dans l’espace francophone » – extrait LFDM-2014).
De ce fait, la Francophonie a, dès l’origine, reconnu et souhaité valoriser cette diversité comme une richesse développant de nombreux programmes favorables aux langues nationales désignées comme « partenaires » du français et à leur expression culturelle. Ainsi, par exemple, du soutien aux travaux consacrés à l’élaboration de bi-grammaires dans le cadre du programme ELAN, des prix attribués aux ouvrages ou aux traductions de et vers les langues nationales, des financements accordés aux industries et créations éditoriales, musicales et audiovisuelles par les différents fonds et appels à projets gérés par l’OIF
Cette diversité linguistique francophone s’applique à la langue française elle-même, qui connaît ainsi des mutations, des variations, voire des hybridations selon les territoires dans lesquels elle est présente (voir « Le français comme on le parle »). Outre les particularités qui caractérisent les langues françaises pratiquées dans les pays où elle est la langue première, comme en Fédération Wallonie-Bruxelles, en France, au Québec ou en Suisse romande, le français se modifie et évolue au grès des usages et au contact des autres langues de ses locuteurs, comme au Maghreb, au Moyen-Orient, en Afrique subsaharienne et dans l’Océan indien, dans la Caraïbe et le Pacifique… On parle par exemple du nouchi (Côte d’Ivoire), du franbanais (Liban), du camfranglais (Cameroun), du Toli bangando (Gabon)…
La prise en compte des variétés du français et la valorisation des langues en contact avec le français constituent un enjeu majeur pour la Francophonie qui soutient des projets comme le Vocabulaire francophone des affaires ou le Dictionnaire des francophones, en cours d’élaboration à l’initiative de la France.
Enfin, par-delà son espace, la Francophonie perçoit la présence et la vitalité des autres langues de communication internationale comme un facteur favorable et nécessaire à la diversité linguistique. Dans cet esprit, elle entretient un dialogue nourri avec les lusophones et les hispanophones grâce aux rencontres annuelles des « Trois espaces linguistiques » (TEL) constitués de la Communauté des pays de langue portugaise (CPLP), de l’Organisation des États ibéro-américains (OEI) et du Secrétariat général ibéro-américain (SEGIB). L’origine commune des langues ainsi représentées, auxquelles on peut ajouter le catalan, l’italien, le roumain, en fait également des acteurs potentiellement associés dans la promotion du multilinguisme, tout particulièrement dans les organisations internationales, par exemple par le biais de l’intercompréhension, approche plurilingue qui encourage l’échange au-delà des frontières linguistiques et qui intéresse tout particulièrement l’Organisation internationale de la Francophonie dans une logique de promotion de la diversité culturelle et de l’exploration des relations entre le français et les autres langues. Elle permet aussi de développer des outils propices à leur apprentissage mutuel, comme l’a fait l’OIF à travers le cours en ligne ouvert et massif (CLOM) « Enseigner l’intercompréhension en langues romanes à un jeune public », suivi d’une session enrichie intitulée « L’interculturel dans l’intercompréhension en langues romanes ».
Une application de sensibilisation à l’intercompréhension, Romanica, pour téléphones mobiles et tablettes, sous forme de jeu sérieux a été réalisée en partenariat avec la DGLFLF (Délégation générale à la langue française et aux langues de France) et l’APICAD (Association pour la promotion de l’intercompréhension à distance) et lancée à l’occasion de la Saison croisée France-Roumanie. Mais, l’intercompréhension peut également être mobilisée entre l’anglais et le français, par exemple. C’est ainsi que l’OIF a lancé un module en intercompréhension de l’anglais vers le français pour diplomates et fonctionnaires internationaux.
Avec Tempo Traduction – une initiative d’aide à la traduction et à la publication vers le français et, pour le Prix des 5 continents, vers les langues partenaires – l’OIF cherche à rendre accessibles aux lecteurs des auteurs contemporains représentatifs pour les différents espaces de la Francophonie, d’encourager le mouvement de traduction ainsi que l’édition d’œuvres littéraires de qualité et à renforcer ainsi la circulation transnationale des œuvres. En 2018, plusieurs publications bilingues d’auteurs francophones ont été soutenues : Congo Inc. Le testament de Bismarck,de In Koli Jean Bofane, lauréat du Prix des 5 Continents, 2015, en français – vietnamien ; La musique d’une vie d’Andreï Makine en français-sérère ; Une Anthologie de poésie, de Salah Stétié,en français-roumain ; Le corps de ma mère de Fawzia Zouari, lauréate du Prix des 5 continents en 2016, en français – vietnamien ; Six pièces de théâtre de Yasmina Reza en arménien.
L’OIF est également partenaire de l’Organisation arabe pour l’Éducation, la Culture et les Sciences (ALECSO) dans l’attribution du Prix Ibn-Khaldoun Senghor, décerné chaque année à une traduction du français vers l’arabe et de l’arabe vers le français.
Séminaire pour le renforcement des politiques d'aménagement linguistique
L’OIF a réuni 11 représentants des pays d’Afrique de l’Ouest et de la RDC en juin 2019, dans la perspective de l’appel à manifestation d’intérêt « pour le renforcement des politiques d’aménagement linguistique dans l’espace francophone du Sud » qui sera diffusé en 2020.
Politiques d'aménagement linguistique
Les pays francophones comptent une diversité de langues sur leur territoire national, plus particulièrement ceux qui appartiennent à l’espace francophone du Sud ; une situation qui nécessite une prise en compte spécifique qui passe par le renforcement ou l’élaboration de politiques d’aménagement linguistique ambitieuses de la part des Etats et gouvernements membres.
C’est dans le cadre de sa mission de promotion de la diversité linguistique et culturelle, que l’OIF a donc opéré un élargissement du périmètre d’intervention du programme consacré aux politiques culturelles, en y intégrant un volet sur les politiques linguistiques ; de façon à pouvoir accompagner les pays qui le désirent dans la définition d’une gouvernance et d’une politique linguistiques spécifiques aux situations sociolinguistiques et aux politiques de développement qui leur sont propres.
L’OIF accompagne ainsi les Etats et gouvernements membres de l’espace francophone du Sud dans la création d’environnements favorables au renforcement des liens entre langues et développement, en les encourageant à mettre en œuvre des politiques linguistiques où le français et les langues nationales intègrent une vision globale du développement linguistique et social des pays.
Et ce dans la continuité du Sommet de Madagascar de 2016, au cours duquel l’OIF s’est doté d’une nouvelle résolution, qui ancre la promotion du français dans le cadre d’une politique favorable à la diversité linguistique, pour que la valeur des différentes langues puisse être prise en compte dans le développement économique de tout pays.
Car, si la dimension culturelle et linguistique est de plus en plus valorisée dans les politiques publiques nationales, il n’en demeure pas moins que la gouvernance et les partenariats linguistiques doivent encore être approfondis à travers la définition et la mise en œuvre de politiques performantes d’aménagement du multilinguisme et la promotion du plurilinguisme.
En réponse à ces besoins, un premier séminaire régional a donc rassemblé à Dakar, du 26 au 28 juin 2019, des acteurs issus de structures étatiques, scientifiques et associatives en charge de l’aménagement linguistique auprès des ministères investis de la promotion des langues et des cultures nationales (Education, Alphabétisation et promotion des Langues nationales, Culture ou encore Coopération).
Les bénéficiaires qui représentaient 10 pays d’Afrique de l’Ouest (Bénin, Burkina Faso, Côte d’Ivoire, Gambie, Guinée, Mali, Mauritanie, Niger, Sénégal et Togo) ainsi que la RDC, pourront ainsi contribuer au renforcement des politiques d’aménagement linguistique des Etats et gouvernements membres qui souhaiteront s’engager dans des actions en faveur de la promotion de la diversité des langues et des cultures.
Cette rencontre visait tout d’abord à présenter les enjeux du plurilinguisme et de la diversité culturelle, s’inscrivant également plus largement dans les mécanismes de la gouvernance linguistique nationale : environnements linguistiques et instruments juridiques existants, stratégies de sauvegarde et de valorisation, outils pour l’alphabétisation, bonne pratiques et exemples de plan de politiques d’aménagement linguistiques (stratégie, méthodologie, planification) qui ont déjà été mis en œuvre avec succès dans des pays du Nord et du Sud.
Les outils théoriques et pratiques qui ont été transmis permettront enfin aux futurs porteurs de projets de politique d’aménagement linguistique de structurer, avec l’appui du (ou des) Ministère(s) qui l’accompagnera, des propositions en cohérence avec les actions portées sur le terrain par les différents partenaires, de les ancrer dans les politiques nationales d’aménagement linguistique ; et de répondre ainsi à l’appel à manifestation d’intérêt qui sera diffusé par l’OIF en 2020 « pour le renforcement des politiques linguistiques dans l’espace francophone du Sud ».